Fr. Michel Laloux, Ministre de notre Province de France-Belgique, nous livre en quoi l’appel à une vie religieuse chez les franciscains a été comme une évidence pour lui.
Propos recueillis par Henri DE MAUDUIT
Second d’une fratrie de cinq enfants, originaire de Wallonie, Fr. Michel est élevé dans un environnement familier avec la foi. “Souvent, le curé ou le vicaire venait manger une tartine chez nous. C’était à la belge !” Et dans le magasin familial de son père photographe, il y a du monde qui passe, “dont des prêtres qui venaient aussi tailler une bavette !” s’exclame-til dans un accent qui ne laisse pas douter de ses origines wallonnes.
UNE LONGUE AMITIÉ
“J’ai beaucoup de chance parce que la relation avec Dieu a toujours été. Elle est naturelle, c’est une longue amitié et ce depuis tout petit.” Ainsi, le souvenir de sa première communion à l’âge de six ans reste gravé en lui, autant que sa profession de foi cinq ans plus tard. “On fêtait ça autour d’un repas mais je me disais en moi : je ne suis pas là pour les cadeaux et le repas ! Parce qu’au moment du repas, on ne parlait pas de Dieu… Pour moi, cela me semblait bizarre, je le vivais comme une contradiction” raconte Fr. Michel.
Adolescent, entre scoutisme et judo, il apprend à sortir de lui-même et de sa timidité. Il fréquente aussi un groupe de partage d’Évangile avec d’autres jeunes de sa paroisse. Et tous les soirs, en famille, ils récitent la prière pour la paix attribuée à saint François. Car chez lui, le Poverello n’est jamais très loin. Si sa mère est engagée dans la Fraternité franciscaine séculière, c’est surtout grâce à un grand-oncle franciscain, missionnaire au Congo, qu’il découvre petit à petit cette spiritualité. “Il ne se répandait pas par rapport à sa foi mais il était bienveillant et plein de bonté, présent et habité, paisible avec un rayonnement qui passe au-delà de la parole” se souvient notre frère belge.
C’est donc naturellement qu’il se confie à lui à propos de son cheminement personnel, alors qu’il n’a que 18 ans. “Il m’a répondu : Va voir chez les franciscains à Bruxelles, cela ne t’engage à rien !”
PREMIÈRE RENCONTRE
Il pousse alors la porte du couvent du Chant-d’oiseau. Il se souvient de sa première rencontre avec les frères : “Je logeais au couvent et j’avais si bien dormi que je ne me suis pas réveillé le lendemain et j’ai zappé l’office du matin ! Je suis arrivé au moment où les frères sortaient de l’office et en me voyant, ils se sont mis à rigoler !” raconte-t-il dans un rire franc.
Un détail, certes, mais qui l’a pourtant beaucoup frappé. “C’est un évènement que je retiens aujourd’hui, qui peut sembler très léger mais qui, en même temps, symbolisait pour moi une religion décoincée, une ouverture que je trouve importante dans la foi.” Une manière d’être et de vivre qu’il constate au contact quotidien avec les frères, dans la manière de lire l’Évangile, de cuisiner soi-même… “Je n’aime ni le laxisme, ni la rigidité ! Là, j’y trouvais à la fois une profondeur et une souplesse, un juste équilibre. Et puis, ce qui m’a aussi beaucoup marqué, c’est que je me suis senti tout de suite chez moi. Nous avions des conversations simples à table, il y avait de la place pour le rire mais également pour des échanges en profondeur.”
Quand il prend la décision d’entrer chez les franciscains, ses parents le sentent heureux et ne s’y opposent pas. “Sans me stimuler ni me freiner, ils m’ont posé des questions pour me renvoyer à ma propre liberté, ce que j’ai trouvé ajusté” confie-t-il.
DE LA BLOUSE À LA BURE
L’année suivante, il entre au postulat dans une petite fraternité belge. En parallèle, il commence des études d’infirmier qu’il mettra en pause l’année d’après, le temps du noviciat, avant de les prolonger avec une spécialisation d’infirmier social pendant deux ans.
C’est dans la banlieue liégeoise, à Seraing, qu’il accomplira ce temps du noviciat. Pendant trois ans, avec quelques frères, il vivra en milieu précaire. “On n’avait qu’une pièce chauffée, pas d’eau chaude, on dormait en dortoir et on vivait auprès des gens du quart-monde. Pour moi, cela a été une épreuve que de découvrir la grande pauvreté, des gens qui n’ont pas à manger à la fin du mois, mais aussi au niveau de la relation avec les frères, avec cette promiscuité.”
Un mode de vie grâce auquel il a beaucoup appris et confie : “La vie religieuse franciscaine a été vraiment source de développement humain intégral, avec à la fois l’aspect collectif de la fraternité et la relation personnelle avec chaque frère.”