L’ermitage de La Cordelle, à Vézelay, a célébré la pose de la première pierre de son chantier de rénovation après d’importantes fouilles. Mais que s’est-il passé au cours de ces derniers mois ? Orianne Wadel, archéologue de l’Inrap1 et responsable des opérations à La Cordelle, nous le partage.
Etape 1
Lorsqu’un permis de construire est déposé, l’État (via la Drac2) regarde si la zone est sensible au niveau archéologique. Pour La Cordelle, un diagnostic d’archéologie préventive (financé par l’État) a été prescrit en février 2024 afin de vérifier si le terrain recélait des traces d’anciennes occupations humaines. Des sondages ont ainsi été faits sur 10 % de la parcelle concernée par les travaux de construction.
Etape 2
À l’issue de cette première intervention, les archéologues ont remis un rapport aux services de l’État. “Sur la base de ses conclusions, soit les frères étaient autorisés à entreprendre immédiatement les travaux soit une fouille préalable devait avoir lieu.” Ce fut la seconde option pour La Cordelle, des vestiges ayant été mis au jour lors du diagnostic. Après étude de plusieurs devis, les frères décidèrent de confier les fouilles préventives à l’Inrap, en partenariat avec le CEM3. Fin juillet 2024, Orianne Wadel, accompagnée d’une équipe d’archéologues, faisait son retour.
Etape 3
“Les fouilles ont duré sept semaines. Il a d’abord fallu déblayer le terrain, puis on a creusé sur trois mètres de hauteur et sorti pas moins de 35 camions de terre ! Il s’agissait vraiment d’effeuiller le site par phase. Pour cela, on a dû démonter manuellement les murs des différentes époques pour finalement atteindre le paléosol (le sol le plus ancien). Ce fut assez intense physiquement.”
Etape 4
Alors, tout cela pour quel résultat ? “On a retrouvé des maçonneries et des lambeaux très probablement de la première implantation franciscaine”, révèle Orianne. Elle a deux ans pour rendre son rapport final qui devrait faire “plus de 400 pages !” Mais elle se réjouit dès à présent : “Quand on connaît l’histoire du site qui a brûlé et été détruit, c’est honnêtement une très bonne surprise d’avoir des vestiges du XIIIe siècle.” En plus d’éléments de céramique, deux statues et un chapiteau ont aussi été mis au jour, venant probablement de l’ancienne église du couvent. “Ils vont partir en musée pour être étudiés et restaurés, il faut stabiliser la polychromie.”
Etape 5
Le chantier de fouilles a pris fin le 20 septembre, veille des Journées européennes du patrimoine et de la pose de la première pierre. À cette occasion, Orianne était conviée à la revue du projet, qui a lieu tous les vendredis avec les architectes, afin de leur présenter les premiers résultats. “La zone de fouilles est maintenant aux frères, ils peuvent entreprendre leur construction.” C’est en effet sur ce lieu, témoin de l’Histoire, que la future porterie sera érigée. Et quand on demande à Orianne ce qu’elle retient de cette cohabitation avec les franciscains, elle n’hésite pas un instant : “On a bien rigolé et on a été gâtés, on avait nos goûters, nos petits fruits… Je crois qu’on a fait des jaloux, vous avez mis la barre très haut les frères !”
1Inrap : Institut national de recherches archéologiques préventives.
2Drac : Direction régionale des affaires culturelles.
3CEM : Centre d’études médiévales d’Auxerre.