Itinérance : « Nous ne sommes pas les maîtres de notre route »

C’est un appel au « lâcher prise » au décentrement » pour nous recentrer sur le Christ dans la marche.

Depuis plus de 20 ans, Fr. Jacques vit des temps d’itinérance. Il y a 5 ans, il a rencontré le frère italien Fr. Gabriele. Après le Mont-Saint-Michel et les chemins de Compostelle, ils ont initié cet été une nouvelle route au départ de Nantes, « la Via Ligeria ». Voici quelques extraits de leur récit de route.

« Nous sommes heureux de nous retrouver, Fr. Gabriele et moi, après plusieurs itinérances vécues ensemble avec des groupes plus importants. Nous évoquons quelques bons souvenirs des années passées. Cette année c’est un peu différent : nous serons seulement à 2 au lieu de 5 ou 6 les autres fois.

À Mauves-sur-Loire (44), nous cherchons un lieu pour prier et manger. Nous demandons de l’eau dans une maison. Un homme derrière son muret tient une boite de cornets de glaces car il venait d’en distribuer à ses petits-enfants. Il la tend aussitôt vers nous et nous dit : « Tenez ! C’est pour vous ! Prenez-en ! » Et, avec le sourire aux lèvres : « Vous aussi vous êtes de grands enfants ! » La surprise est totale pour nous mais nous comprenons tout de suite qu’il s’agit d’un signe de la providence de Dieu, de sa prévenance, sa bonté, son encouragement, son amour gratuit envers nous, sa joie de nous voir ainsi sur les routes dépouillés et heureux dans ses pas à la manière de François d’Assise, ouverts à ce qui vient par l’inspiration de l’Esprit Saint !

À Ancenis (44), nous allons voir Brigitte, membre de la fraternité franciscaine séculière « Carceri » que j’accompagne. Nous nous donnons rendez-vous à l’église pour les Laudes. Il y a là un vitrail central qui représente la marche de Jésus sur la mer mais aussi celle de Pierre qui a besoin d’être sauvé, libéré de ses peurs pour marcher en confiance vers son maitre. L’occasion pour nous de nous rappeler l’itinérance de nos débuts où nous avions peur de partir ainsi pauvre et mendiant. C’est un appel au « lâcher prise » au décentrement » pour nous recentrer sur le Christ dans la marche.

Plus loin, à Saint Florent-le-Vieil (49), nous passons à coté de voyageurs saisonniers qui nous proposent un café. Nous acceptons volontiers et faisons connaissance. Surpris, ils nous trouvent étonnamment « abordables » pour ses « gens d’Église ».  Ce qui fait penser à cette phrase de François d’Assise : « Nous étions des gens simples ». Bienheureuse et sainte simplicité qui fait sauter les barrières et permet les rencontres !

À Saint-Benoît-la-Forêt (37) enfin, après une dizaine de kilomètres de marche, nous apercevons quelques maisons isolées au loin. Sans doute des lieux où nous irons mendier. Quelle n’est pas notre surprise lorsque sur cette route déserte s’arrête une voiture juste à notre hauteur alors que nous n’avions rien demandé. C’est Michèle, très souriante en ouvrant sa vitre. Elle est avec Tahar, son mari. Ce couple islamo-chrétien des Yvelines nous demandent si nous voulons profiter du passage. C’est « bien volontiers ! » que nous acceptons de monter. Nous comprenons une fois de plus que nous ne sommes pas les maîtres de la route. Nous sommes conduits, du moins nous tentons de nous laisser être conduits par l’Esprit Saint notre bon guide. »

Fr. Jacques JOUËT

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