Rael-Miguel est graphiste et illustrateur. En 2023, les frères de France et de Belgique lui confient le relooking du site Internet de la Province. Pour cet artisan de 40 ans, passionné de mystique, converti tard au catholicisme, ce projet est l’occasion de renouer avec une vieille figure amie qui a un jour bouleversé sa vie. Témoignage.
Il y a, dans la maison de Rael-Miguel à Montpellier, un mur d’icônes. Des saintes et des saints mystiques, orthodoxes et catholiques, aux parcours tous plus fous, décalés, profonds ou prophétiques. Rien d’étonnant, ainsi, à découvrir le portrait de François d’Assise parmi ces figures. Du Poverello italien, l’artiste ne connaissait pas grand-chose il y a quelques années encore. Né dans une famille communiste, ce passionné de graphisme se convertit au catholicisme et demande le baptême à l’âge de 30 ans. Dans la même période, un film posté par un inconnu sur YouTube lui donne à découvrir la vie de saint François. Hasard ou providence, cette figure moyenâgeuse italienne répond chez lui à une soif de radicalité, de changement et d’absolu. Rael-Miguel se laisse toucher au cœur. “Je crois que j’ai été attiré par son côté fou de Dieu, sa capacité à tout abandonner par amour. Il y a, chez François d’Assise, une radicalité qui a certainement fait écho à la mienne”, relit-il aujourd’hui.
UN DÉNUEMENT SPIRITUEL ET MATÉRIEL
Il évoque cette période de conversion avec pudeur, sans s’appesantir sur les difficultés alors rencontrées. “Deux années avant ma conversion, je gagnais assez bien ma vie ; mais lorsque je me suis converti, j’ai fait le choix d’abandonner beaucoup de choses, matériellement et intérieurement. J’ai vécu un moment de dénuement un peu semblable à celui de saint François”, confie-t-il. Le souffle de l’Esprit “l’a poussé à repenser [mon] existence en fonction de ce que je découvrais du Christ. Concrètement, j’ai passé beaucoup de temps à découvrir la foi chrétienne plutôt que de subvenir à mes besoins. Je me suis retrouvé sans revenu, car cette soif de Dieu, à ce moment précis, prenait toute la place.” Mois après mois, Rael-Miguel poursuit son parcours avec saint François, avant de rencontrer, sur sa route, d’autres figures spirituelles qui remplacent dans son cœur le Poverello.
ENTRE LE DESIGN ET LA MYSTIQUE
Dix années et deux enfants plus tard, en 2022, Rael-Miguel se voit confier la refonte graphique du site Internet des franciscains. Sa foi et son attachement à la mystique chrétienne infusent désormais toute sa manière d’appréhender son travail. “Je cherche à me laisser transformer par les personnes et les projets qu’on me confie”, sourit-il. “Je ne me considère plus comme un artiste mais comme un artisan. Mon métier n’est pas de proposer quelque chose qui émane de moi, mais de faire ressortir ce qu’une communauté religieuse porte en elle.” Par ce nouveau projet, Rael-Miguel renoue avec saint François et la spiritualité des frères mineurs. “Dès le début de notre collaboration, j’ai voulu cheminer spirituellement avec eux en me laissant imprégner”, raconte-t-il. Il assiste d’abord à la messe avec les frères. Puis, avant chaque session de travail, il prie l’icône de saint François “pour être en communion spirituelle avec les franciscains.” Depuis Montpellier, il creuse aussi la théologie franciscaine en se procurant le célèbre livre Sagesse d’un pauvre, d’Éloi Leclerc. L’ouvrage le transforme intérieurement : “J’avais sous-estimé la profondeur mystique de saint François”, reconnaît-il humblement. “On peut avoir des idées un peu simples sur quelqu’un d’exalté, qui se libère de tout, qui parle aux arbres et aux animaux. Il y a en fait chez François d’Assise une profondeur et une compréhension de l’Homme qui est lumineuse.” Rael-Miguel s’émerveille ainsi de percevoir, chez François, une lumière divine qui le nourrit intérieurement. “François d’Assise, c’est avant tout cet abandon à la volonté divine. J’ai perçu avec lui que l’élan vital qui était au fond de nous provient de « l’au-delà de tout », et qu’il fallait essayer de faire silence à nous-même et à nos propres volontés pour se mettre à l’écoute de sa présence.”
UN CHEMINEMENT PARMI LES MYSTIQUES
Le nouveau site Internet est en passe d’être terminé. Si l’accompagnement de Rael-Miguel auprès des franciscains a été purement graphique, il aura également représenté pour l’artisan une expérience de partenariat particulièrement féconde. “Prier ensemble, c’est la base, et c’est vraiment pour cela que je m’oriente vers ce type de métier. J’ai travaillé spontanément avec cette dimension spirituelle auprès des franciscains, et cela nous a portés et tenus en communion. Cela a rendu notre collaboration très fluide”, se réjouit-il. “Pour moi, ce qui compte aujourd’hui, c’est de se laisser porter par le souffle de Dieu qui est premier. C’est ce que faisait saint François, et c’est ainsi qu’on est appelés à vivre les uns avec les autres !”
Claire RIOBÉ
