Qu’est-ce qu’un « ministre » chez les franciscains ?

Capture du film l'ami avec Elie de Cortone, l'un des premiers ministres de l'ordre franciscain
Ce doit être un service désintéressé et qui ne comporte aucun honneur personnel.

Valse ministérielle, démission, nomination… Les mois derniers, nos ministres ont accaparé l’espace médiatique belge et français. François d’Assise nous permet de revenir sur l’origine et le sens franciscain de ce mot par lequel il désignait les frères en responsabilités.

Pour commencer, il convient d’oublier le sens que nous donnons habituellement à ce mot pour parler des ministres de nos républiques, désignant des serviteurs de l’État. Un statut très honorable qui correspond à une situation sociale et économique très flatteuse. En effet, François d’Assise ne connaît pas cette situation qui n’apparaîtra que plus tard pour parler des fonctionnaires royaux exerçant un pouvoir délégué par le roi.

UN « MINISTRE » SERVITEUR

La référence de François appartient au vocabulaire ecclésiastique trouvé dans la Bible, les Pères de l’Église et surtout la liturgie. Le mot “ministre” signifie alors un serviteur chargé d’une mission précise. Dans la Bible, les anges sont qualifiés de ministres des actions divines. Paul se dit chargé du ministère de l’évangélisation. Les Pères de l’Église et la liturgie parlent des diacres et des prêtres comme ministres de Dieu pour des actions liturgiques et des sacrements. Le mot sous-tend l’idée que le ministre n’est rien par lui-même, mais qu’il a reçu une délégation pour un service précis à rendre à Dieu, à l’Église, à la communauté. Ce doit être un service désintéressé et qui ne comporte aucun honneur personnel.
François a choisi ce terme de “ministre”, en opposition au vocabulaire monastique employé alors, qui parle d’abbé, de prieur, de préséance, de pouvoir, charges qui s’étaient peu à peu entourées d’honneur, de révérence et de préséance.

PARDONNER

Pour parler de “serviteur”, il avait le choix entre deux mots : “servus” et “minister”. Le mot “servus” est employé tantôt avec le sens d’esclave, tantôt avec le sens plus général de serviteur. Mais, ce mot concerne tous les chrétiens, tous les frères : “Faites-vous serviteurs les uns des autres”, dit saint Paul ; ou encore : “Vous êtes tous les serviteurs du Christ”. Le mot “ministre”, lui, permet d’insister sur la fonction de service des frères que ceux-ci leur ont confié et qu’ils devront quitter à l’issue de leur mandat. Prenons un instant pour laisser résonner les mots de François :
1er Règle, 4,6 : “Les ministres et serviteurs se rappelleront que le Seigneur dit : Je ne suis pas venu pour être servi, mais pour ‘servir’.” Les ministres provinciaux sont donc chargés, pour un temps, de servir les frères et les communautés d’un territoire précis. Il s’agit surtout du ministre général ou des ministres provinciaux.
2e Règle, 10,1 : “Les frères qui sont ministres et serviteurs des autres frères, visiteront leurs frères, les avertiront, les corrigeront, avec humilité et charité, sans leur prescrire jamais rien qui soit contre leur âme et contre notre règle.” Lettre à un ministre, 9, 11 : “Si n’importe quel frère au monde, après avoir péché autant qu’il est possible de pécher, peut rencontrer ton regard, demander ton pardon, et te quitter pardonné. S’il ne demande pas pardon, demande-lui, toi, s’il veut être pardonné. Et même si après cela il péchait encore mille fois contre toi, aime-le plus encore que tu m’aimes, et cela pour l’amener au Seigneur. Aie toujours pitié de ces malheureux.”

Fr. Luc MATHIEU, OFM

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