L’esprit franciscain renaît au couvent de Hertogenbosch aux Pays-Bas

Un projet de vie, respectueux des rythmes, des charismes et des âges de chacun.

Fr. Tiem Tran Ngoc s’est rendu aux Pays-Bas, en avril, et il a découvert le “Stadsklooster – San Damiano”. Un projet porté en famille franciscaine qui réjouit le frère Rob Hoogenboom, Ministre provincial des Saints-Martyrs de Gorcum…

“Nous vivons une étape très intéressante. Dans un passé proche, nous avons fermé plusieurs maisons. Il a fallu nous rendre à l’évidence et accepter la réalité telle qu’elle est : une chute de notre nombre et peu de vocations. Mais quand même quelques entrées… Alors nous avons décidé de nous mettre à leur écoute. Pour cela nous avons demandé aux plus jeunes : “De quoi rêvez-vous pour le futur ?”, racontent les frères Rob Hoogenboom, Ministre provincial, et AriejanKuin, secrétaire de la Province, lors de leur passage à Paris par une matinée ensoleillée de mars. Ils poursuivent : “Nous avons pris conscience que nos actions provinciales sont souvent déterminées par le passé, nos années de mission où nous étions nombreux. Des frères plus jeunes arrivent et étonnamment, ils gèrent mieux la tradition que nous et réclament autre chose. Une présence différente de celle que nous avons connue, des modes de vie que nous n’aurions jamais souhaités : le retour à la vie au couvent, le désir d’avoir une paroisse… Nous ne pouvions pas leur imposer notre manière de vivre l’Évangile à la suite de François mais nous n’avions pas de maison qui pouvait correspondre à leurs attentes. Nous avons fait appel aux évêques, sans succès”.

IMAGINER QUELQUE CHOSE ENSEMBLE

Au même moment et après une longue présence à Hertogenbosch, les frères capucins décidaient la fermeture de leur grand couvent. Un couvent et un cloître magnifiques, au cœur d’une ville de 200 000 habitants, avec une paroisse, à côté de la gare et de l’Université. Une triste nouvelle déjà parvenue aux oreilles de Michel Versteegh, responsable de l’Ordre franciscain séculier (OFS), qui sans attendre, l’avait partagée aux sœurs clarisses afin de les convaincre de maintenir une présence franciscaine à Hertogenbosch. “L’OFS et les clarisses nous ont dit : ne pourrions-nous pas imaginer quelque chose ensemble ?” se souvient Fr. Rob.
Mais nos trois branches ne sont pas au bout de leur surprise et déception lorsqu’elles apprennent que les frères capucins ont déjà fait une promesse de vente à l’Université de la ville. Dans une semaine, la signature de la vente aura lieu. Ne reculant pas devant les obstacles, voici que nos trois branches demandent au Provincial capucin la permission d’écrire au conseil de l’Université pour lui exposer le projet et le convaincre de renoncer à l’acquisition. Cette lettre parvint un vendredi, trois jours avant la date fatidique. Le lundi suivant, le Conseil renonçait à son projet de rachat pour permettre à la présence franciscaine de se perpétuer au cœur de la cité. Le Seigneur ne fait-il pas des merveilles ?
“Très vite s’est posée la question : comment allons-nous faire ? Il n’y avait pas vraiment de projet, plutôt des idées et des désirs”, se souvient Fr. Ariejan. Le couvent est immense, il fallait écrire ensemble un projet de vie, respectueux des rythmes, des charismes et des âges de chacun. “Deux frères capucins assez âgés n’étaient pas encore partis et nous nous sommes dit qu’il y aurait de la continuité s’ils restaient dans le projet. Plusieurs d’entre nous se sont lancés dans l’aventure, notamment les plus jeunes. Un jeune capucin a, lui aussi, été séduit par le projet et a demandé à rejoindre le groupe ! Trois sœurs clarisses sont entrées dans la danse et en février 2018, Michel et son épouse, de l’OFS, nous ont rejoints”. En octobre 2018, c’est le Provincialat OFM qui a déménagé à Hertogenbosch “pour encourager la démarche et aller vers la vie et le monde d’aujourd’hui !” s’exclame Fr. Rob plein d’espérance.
“Les mots sont importants et, depuis le début, nous insistons pour dire qu’il ne s’agit pas “d’une seule communauté” ou “d’une communauté inter-obédience” mais plutôt d’un “projet de large présence franciscaine” explique-t-il encore.

UN MONASTÈRE DANS LA CITÉ

Ce projet s’organise autour des plusieurs axes. Tout d’abord la fraternité se nomme : Stadsklooster – San Damiano. Le concept de “Stadsklooster” (ou Monastère dans la cité) est relativement récent aux Pays-Bas. Il connaît un intérêt croissant auprès des chrétiens catholiques et protestants. Le “monastère” est un lieu ouvert pour les citadins qui peuvent venir y prier, partager pour quelques jours la vie de la communauté, ou bien participer aux activités spirituelles qui y sont proposées. Les frères et les sœurs vivent des temps de prières communs, partagent une nourriture simple, végétarienne en général, hormis le vendredi et le dimanche où du poisson et de la viande sont servis. La beauté et la sérénité du lieu favorisent ainsi le recueillement et la méditation.
Les frères s’impliquent dans la pastorale de rue auprès des pauvres, des personnes toxicomanes et isolées. Tous les samedis, les frères invitent ces personnes à se retrouver dans l’église du couvent pour un temps de prière et de convivialité. D’autres frères assurent un travail ministériel de type paroissial sur un secteur donné ou le travail d’infirmier dans l’hôpital de la ville. L’originalité de cette nouvelle fondation demeure, sans aucun doute, l’esprit dans lequel se vivent les relations entre les frères, les sœurs et les laïcs. Ce qui frappe, c’est la simplicité de la relation dans laquelle la différence des états de vie et les fonctions s’estompent pour laisser place à la personne, pour permettre la rencontre d’un “je” et d’un “tu” vivant sous le même toit, la même maison commune à tous, chacun apportant ce que Dieu a mis de meilleur en lui.

Fr. Tiem TRAN NGOC, OFM et Émilie REY

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