À cœur
ouvert

Fr. Nicolas Morin

« Est-ce que j’ai une tête de franciscain, moi ? »
Je ne connaissais pas saint François et ça a été le coup de foudre !

Bio express

20 mai 1965

Naissance à Rouen


1988

Entrée au noviciat à Rennes


1990

Profession simple à Rennes


1994

Profession solennelle à Nantes


1997

Ordination sacerdotale à Bordeaux


2015 à 2025

Mission de prêtre exorciste pour le diocèse de Besançon


Septembre 2025

Élu définiteur de la Province

Fr. Nicolas anime chaque été la Route d’Assise. Il nous partage son chemin de discernement qui donne raison à Antoine de Saint-Exupéry : « On ne voit bien qu’avec le cœur ».

Propos recueillis par Henri DE MAUDUIT

« Depuis tout petit, j’avais dans le cœur cette idée d’être prêtre, mais avec la certitude que je ne serai pas prêtre seul. Est-ce parce que je suis né dans une famille nombreuse ? »
Fr. Nicolas a grandi à Rouen, entouré de ses parents et de ses six frères, dans un cadre familial chrétien. Après cinq années de louveteau puis une année de scoutisme, il découvre le Mouvement eucharistique des jeunes (MEJ(1)). « Ce mouvement a donné une colonne vertébrale à ma foi. J’y ai découvert l’Évangile comme une parole neuve, une parole qui me concernait, qui me parlait personnellement », confie-t-il. « Pendant douze ans, j’ai fait, chaque été, un ou deux camps. Ils m’ont permis de vivre ma foi dans un vivre ensemble et de côtoyer aussi des belles figures de prêtre. »

COUP DE FOUDRE

À Reims, lors d’un rassemblement national du MEJ, il vit un moment décisif alors qu’il n’a que 15 ans. Alors qu’il entend un prêtre lire l’Évangile du jeune homme riche (Mt 19, 16-30), il reçoit « comme un coup à l’estomac : cet Évangile que j’avais déjà entendu de multiples fois, j’ai eu soudain la certitude qu’il était pour moi et que ce jeune homme, c’était moi. Je me souviens que j’avais le cœur qui battait la chamade ! », se souvient Fr. Nicolas comme si c’était hier. Cette parole, bien que reçue comme une certitude, soulève des peurs en lui. « Est-ce que je serais comme le jeune homme riche, à me détourner de l’appel du Christ ? Est-ce que je serais capable de suivre Jésus ? » s’interroge-t-il. « Saurais-je répondre à cet appel à quitter des fausses richesses, des fausses assurances, pour me risquer à la suite du Christ ? »
Cette même année, il voyage en famille à Assise. Le coeur s’emballe à nouveau : « Je ne connaissais pas saint François et ça a été le coup de foudre ! Ce que je découvrais de cet homme, c’était l’appel que je ressentais au fond de moi depuis toujours. Ce même appel à une vie fraternelle, à une vie partagée avec les pauvres dans une joie profonde. Et puis cette découverte, aussi, que François n’était pas un homme parfait, il avait aussi ses limites. Je me suis dit : peut-être que moi aussi j’ai ma place alors avec mes propres limites ? »

UN APPEL À PRENDRE AU SÉRIEUX ?

« Et ensuite ? Que faire quand on a 15 ans et que l’on a cet appel au fond de soi ? Là, je me suis laissé faire, je me suis laissé guider… » Deux années passent. Fr. Nicolas est invité à participer à un camp itinérant en Bretagne, accompagné par le frère Marcelin, franciscain, et le frère Jo Coz, capucin, ainsi qu’une famille de gitans. Une première rencontre avec des franciscains lors de laquelle, il découvre un esprit de simplicité, de joie, de fraternité. « Je me sentais chez moi ! » À la fin du camp, une sœur l’interroge : « Nicolas, as-tu jamais pensé à être franciscain ? » « Je n’en avais pas parlé pendant le camp ! Je lui réponds : mais est ce que j’ai une tête de franciscain ? « Oui », m’a-t-elle répondu ! Je me suis alors dit : si une personne extérieure authentifie l’appel que je ressens, alors même que je n’en avais pas parlé, ça veut dire que c’est sans doute un appel à prendre au sérieux. » À la fin du lycée, toujours très engagé au MEJ, ainsi qu’à l’aumônerie, il décide de rencontrer son évêque pour lui confier cet appel franciscain qu’il porte au fond du cœur.
« Je t’attendais ! » C’est par ces mots que l’évêque le reçoit. Dans un premier temps, il l’invite à faire des études afin de mûrir avant de revenir le voir. « Ça m’a un peu désappointé et j’ai commencé une année de fac sans conviction. » Un an après, toujours habité par le même appel, il retourne le voir et est alors accepté au séminaire d’Issy-les-Moulineaux. « Là, je sortais de mon petit monde protégé, un peu fermé sur lui-même. J’ai alors pu découvrir un visage d’Église plus large que celui que je connaissais jusque-là. »
Après deux années, Fr. Nicolas ressent le besoin de prendre du recul par rapport à sa famille et à son diocèse. Marqué par le racisme en France, il désire vivre concrètement ce que c’est qu’être étranger et est envoyé au Caire pour deux ans. « Je n’avais que 21 ans et je n’étais pas du tout prêt à ce décalage culturel ! Mais ça a complètement changé mon regard sur l’autre et sur moi. Étranger en Égypte. j’étais partout le bienvenu ! »

« VERS QUOI MON CŒUR BAT LE PLUS ? »

Pendant les vacances, il décide de suivre les exercices spirituels de saint Ignace lors d’une retraite de 30 jours au Caire. « Une retraite n’est pas sans combats, c’est un temps où l’on doute. Pour la première fois, je me suis vraiment posé la question : entre le mariage ou la vocation religieuse, quel est le choix de vie pour lequel je suis fait ? Et puis c’est revenu. Comme une évidence, ça confirmait cet appel que je ressentais depuis toujours : c’était là, dans la vie franciscaine, que je serais heureux. » Ce temps de retraite lui permet d’élargir le champ des possibles et de faire de sa vocation un véritable choix. « Pour qu’il y ait choix, il faut qu’il y ait deux possibles qui soient bons chacun. Le mariage est une bonne et belle vocation, la vie religieuse aussi. La bonne question, pour moi, était donc non pas de choisir entre un bien et un mal, mais de discerner ce qui me rendra le plus heureux, vers quoi mon coeur bat le plus ? »
Au sortir de cette retraite, il écrit un mot au provincial pour demander d’entrer chez les frères mineurs. « Je sentais que là, chez les franciscains, je pouvais trouver un chemin de bonheur pour moi. Depuis, je ne cesse de devenir ce à quoi je suis appelé. C’est un chemin qui s’éclaire peu à peu. J’aime cette devise des moines : « Aujourd’hui, tout commence ». »

(1)Mouvement éducatif catholique orienté vers la jeunesse, fondé en 1962.

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