Fr. Jose Alejandro Torrado Mendoza est en charge de la Pastorale des jeunes et des vocations de la Province. Il initie, cette année, une nouvelle formation missionnaire pour celles et ceux désirant annoncer le Christ à la manière de François d’Assise. Portrait d’un missionnaire au grand sourire.
Tout commence alors qu’il n’est encore qu’aspirant à la vie franciscaine. Alejandro est alors envoyé vivre trois mois avec des frères. Il s’en souvient comme si c’était hier : 16 heures de bateau depuis la ville Buenaventura, longer la côte pacifique puis attendre que la marée monte pour s’engouffrer sur le Río Patía. Bien qu’il soit dans son pays natal, Alejandro se prend sa première claque missionnaire ! Le climat, une maladie tropicale, la violence, la drogue, une culture afro-colombienne qu’il découvre, non sans étonnement, avec « des gens qui dansent et chantent toute la nuit » ! Et pourtant, c’est pour cette vie-là qu’il va signer lorsqu’il rentre au postulat à Cali et émet sa première profession en 2006.
DIMENSION COMMUNAUTAIRE ET ECCLÉSIALE
La mission franciscaine prend alors une nouvelle forme, cette fois dans des quartiers populaires de Los Chorros à Cali où les frères gagnent leur pain au milieu des travailleurs. Fr. Alejandro, bien que poursuivant ses études, trouve un job dans un magasin spécialisé dans l’habitat. « Je me revois avec mon uniforme, très heureux de le porter et de pouvoir rapporter un peu d’argent à la fraternité. » Fr. Alejandro découvre toute la dimension communautaire de la mission franciscaine. « À ce moment, je me suis senti faire partie d’un corps, d’une institution et cela a été déterminant », tient-il à souligner.
En compagnie de son frère Richard, « parce que la mission se vit toujours deux par deux », ils changent d’échelle. Vient le temps d’un engagement en diocèse, dans la ville de Puerto Wilches, le long du plus grand fleuve du pays, le Río Magdalena. « Cela a été la rencontre de l’Église à travers des visages de jeunes curés. » Catéchèse, visites de petites communautés, mais surtout élevage de poulets sont au programme pour subvenir aux besoins de la petite communauté franciscaine. Le binôme construit de toutes pièces son poulailler et s’entoure d’un vétérinaire. « Tu penses, je n’avais jamais fait de telles choses, je n’y connaissais rien, mais je crois que je suis expert poulet maintenant ! » La mission est décidément un apprentissage permanent et parfois surprenant.
CONFRONTATION AU RÉEL
Elle est, aussi, faite de déplacements au rythme des chapitres qui se succèdent et annoncent de nouvelles nominations. Nous retrouvons, quelques années plus tard, Fr. Alejandro de nouveau à Cali, dans un quartier populaire, étudiant le jour, serveur la nuit. « Quand le patron du restaurant a su que j’étais franciscain, il m’a demandé de tenir la caisse et je dois dire que j’ai appris plein de choses. » Jusqu’à ce jour où on lui demande de dissocier les paiements en espèces de ceux par carte bancaire. « C’était de la fraude et quand, en toute naïveté, j’ai partagé cela à mon provincial, il a demandé que j’arrête immédiatement. » L’expérience n’aura duré que sept mois et ses frères l’envoient aux États-Unis auprès du Secrétariat général des Missions franciscaines dans le Wisconsin. Chez les franciscains, l’obéissance est vécue comme une conformité à l’obéissance du Christ lui-même. Fr. Alejandro et son confrère partent de gaieté de coeur sans savoir encore ce qui les attend. « Je me suis retrouvé à fabriquer des petits produits qui étaient vendus au profit des missions. »
À son retour, et alors qu’il n’a pas encore prononcé ses vœux définitifs, on lui demande de devenir formateur au noviciat qui se trouve à Ibagué, dans le département du Tolima. Il y a passé sept années. « C’était un peu étrange car j’étais très jeune, mais c’est là que mes frères m’attendaient. Je dis souvent en riant que j’ai fait sept noviciats ! » C’est là qu’il sera ordonné prêtre le 8 décembre 2012. Il se retrouve en mission à la cathédrale de l’Immaculée-Conception d’Ibagué.
« Ce fut magnifique ! Qu’est-ce que j’ai aimé baptiser, faire des enfants de Dieu. Je connaissais le rite par cœur ! » Il découvre une autre facette de la mission et de l’appel franciscain à travers la prêtrise. Il se souvient de sa première Semaine sainte : « L’évêque m’a dit : « Tu vas confesser. » J’ai fait du 8 h – 12 h, 14 h – 18 h et 19 h – 22 h. J’ai littéralement passé la semaine assis dans le confessionnal. » Notre frère exulte de cette proximité avec les fidèles.
AIMER ET ÊTRE PRÉSENT
De la cathédrale d’Ibagué à Bogota, il rejoint ensuite ses premiers amours, dans la région afro-colombienne pourtant si rude pour l’organisme. « J’étais curé dans le port le plus important du pays, à Buenaventura. Les gens ont tellement jeté de déchets que la mer s’est arrêtée. Depuis, ils construisent leurs maisons sur cet agglomérat de déchets ». Les frères y vivent aussi dans une case en bois sur pilotis. « J’ai découvert que le cœur de notre pastorale était d’aimer les gens et de nous laisser aimer. Et quand je dis aimer, ce n’est pas simplement le dire, c’est nous laisser embrasser, manger ensemble à même le sol… » Il passera trois ans dans ce diocèse, l’un des plus pauvres de Colombie.
Ce sera ensuite la France. « Quand on est envoyé en mission, je crois qu’il faut arriver à garder un peu de candeur pour se laisser surprendre par Dieu. » Et il me raconte comment, à son arrivée, il a cherché un travail pour ne pas être dépendant de ses frères français qui l’accueillaient pour la poursuite d’une thèse. À sa grande surprise, « mes frères de France m’ont dit que ce n’était pas de l’argent qu’ils attendaient de moi, mais ma présence. Être là, avec eux, seulement être frère ». En d’autres mots : un être missionnaire pas un « faire ». Et c’est ce qu’il poursuit à la tête de la Pastorale des jeunes depuis quelques années. Celles et ceux qui le connaissent n’en ont aucun doute : son sourire et son accueil sont l’une des clés du succès du Poulailler à Paris. « Mon sourire des débuts n’est pas le même qu’aujourd’hui. C’était un sourire culturel, presque un bouclier de protection dirais-je ; c’est devenu un sourire choisi et authentique avec la conviction que notre mission franciscaine est présence. »
Émilie REY
Une année missionnaire avec les frères
Les frères de France-Belgique initient un parcours missionnaire de quatre week-ends débouchant sur un possible envoi en mission d’un mois dans une fraternité de France ou de la Méditerranée. « C’est une année « pilote », on va tester des choses, alors celles et ceux qui veulent faire un pas de plus à nos côtés pour mettre le Christ au cœur de leur vie sont les bienvenues. » Les quatre week-ends seront l’occasion d’approfondir le sens de la mission pour nous, pour l’Église, pour saint François, pour ses frères et ses sœurs aujourd’hui, tout en prenant en compte sa dimension interculturelle et interreligieuse.
Tu as entre 18 et 35 ans et est intéressé pour en savoir plus sur cette initiative ? N’hésite pas à contacter frère Alejandro :