Les fioretti ou l’esprit de saint François

Ils sont tels un petit traité de spiritualité franciscaine.

Saviez-vous qu’autrefois, les fioretti étaient plus lus que la vie de saint François ? Ce sont ces petits récits qui ont fait connaître le Poverello. D’où viennent-ils ? Méritent-ils l’image « naïve » qu’on leur attribue souvent ? Fr. Max de Wasseige nous en parle avec passion !

Écrits tardifs rédigés une centaine d’années après la mort de François, les fioretti (emprunté à l’italien, qui signifie “florilèges”) trouvent leur source dans les Actus, Le livre des actes du bienheureux François et de ses compagnons, composés de 74 chapitres. Un auteur anonyme en a compilé 53 pour composer ces fameuses fioretti. Il est intéressant de remarquer l’usage du terme “actes” qui renvoie aux Actes des Apôtres. L’expérience franciscaine est donc une représentation de l’Église primitive, les compagnons renvoyant aux douze Apôtres.
Les fioretti sont donc des actes et non une Vita. C’est-à-dire qu’ils étaient moins un récit de la vie ou des conversions du Poverello que des petites captures de moments vécus dans les ermitages, des petites histoires pleines de fraîcheur et d’humanité que se racontaient les frères qui ont vécu avec François, transmis dans un premier temps par le bouche-à-oreille.

MYTHE OU RÉCIT HISTORIQUE ?

Disons-le d’emblée, dans les fioretti, tout n’est pas conforme à la vérité historique. Par exemple, il ne semble pas que François soit allé à Saint-Jacques de Compostelle. Ou bien, on sait aussi que saint Louis n’est jamais allé en Italie. Mais si le pauvre d’Assise n’a pas dit toutes les paroles, s’il n’a pas fait tous les gestes que lui prêtent les fioretti, il n’est pas un mot, pas un acte qui soit étranger à ses véritables intentions. Le saint François des fioretti est peint à la ressemblance parfaite du saint François de l’histoire. Inutile donc de les lire avec un œil d’historien mais il ne faut pas non plus y voir un ensemble de mythes. Je pense qu’il faut y porter un regard de “mystique”, c’est-à-dire de chercheur passionné de Dieu, dans la même attitude que ces frères dans les ermitages. Car on y trouve des méditations brûlantes d’amour, à l’image de ce que François a pu vivre avec ses premiers compagnons. En bref, on peut dire que c’est un vrai traité de vie contemplative et mystique, qui cache la quintessence du franciscanisme.

PRÉSERVER L’IDÉAL PRIMITIF

Au début du XIVe siècle, l’Ordre est devenu puissant et hiérarchisé, on construisait de grands couvents avec des bibliothèques fournies pour les études. Mais dans les Marches d’Ancône, dans de pauvres ermitages, vivaient des frères qu’on appelait les “spirituels” et qui ne se retrouvaient pas dans ces évolutions. Ils voulaient garder jalousement l’idéal primitif de pauvreté, de simplicité et de contemplation. Les “spirituels” voulaient alors rassembler les faits et gestes de saint François qui avaient parfois été omis dans les documents officiels. C’est ainsi que les Actus ont été rédigés – dans les ermitages et non dans le grand couvent (Sacro conventum) – qui donnèrent ensuite les fioretti, pour exalter et défendre un idéal menacé.

POURQUOI LES RÉHABILITER ?

Aujourd’hui, on travaille beaucoup plus les écrits tels que les biographies rédigées par saint Bonaventure et Celano, et on a un a priori sur les fioretti qui semblent très naïfs au premier regard. Mais personnellement, si on me les avait donnés à lire au noviciat, j’aurais été heureux ! Il manquait un peu d’une aspiration verticale. C’est pourquoi je souhaiterais les réhabiliter car, au-delà de la vérité historique, ils sont tels un petit traité de spiritualité franciscaine avec des perles inspirantes aujourd’hui.
Saint François y est présenté avec ses frères, expérimentant la fraternité, ce n’est pas François tout seul. Quelque part, c’est ce qu’on vit en fraternité ou en famille aujourd’hui, dans nos partages, nos temps de silence… Là-dessus je crois que les fioretti peuvent nous aider.

Fr. Max DE WASSEIGE, OFM


Dans les coulisses des fioretti

Paris, lundi 29 janvier. Sur scène, dans la chapelle Notre-Dame-des-Anges, au 104 rue de Vaugirard, Théophile Choquet met toute son âme et son corps dans l’apprentissage de onze fioretti. Dans l’assemblée déserte, Francesco Agnello, metteur en scène, le reprend avec douceur. Les deux hommes préparent, “en secret”, le retour sur scène du succès de Francesco. C’était il y a plus de trente ans, c’était d’ailleurs sa première pièce. Et quel succès : plus de 1 800 représentations dans toute l’Europe et outre-Atlantique ! Et quand on lui demande comment et pourquoi il a décidé de mettre en scène les fioretti, Francesco relate son enfance : “Quand j’étais gamin, ma mère me racontait l’histoire du loup de Gubbio et c’est resté ! Ces petites histoires offrent une spiritualité joyeuse, chaleureuse, vivante, cela fait du bien ! Chez saint François, on se touche, on rit, on s’émerveille.”

Francesco, en tant qu’artiste, y est particulièrement sensible. Sollicité par deux lycées rennais en octobre 2023, Francesco s’est laissé “appelé” et il réussit le pari de présenter sur scène un seul acteur qui, tour à tour, se fait la voix de frère François, frère Léon, le lépreux… Quelques instruments viennent sublimer ces textes qui, bien que moyenâgeux, résonnent avec l’aujourd’hui. Pour l’heure, les répétitions se poursuivent jusqu’à la première prévue le 1er mars à 12 h 30 dans la même chapelle Notre-Dame-des-Anges.

Alors amis Parisiens, à vos agendas (le 1er, le 15 mars puis tous les vendredis à 12 h 30 et 20 h). Et pour celles et ceux qui auraient envie de présenter ce spectacle, en région, à l’occasion des centenaires franciscains par exemple, n’hésitez pas à contacter Francesco de notre part via cette adresse.

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