Vous avez dit “visite canonique” ?

La réussite de la visite canonique dépend de l’engagement de chacun.

Depuis quelques mois, Fr. Michel Laloux, notre Ministre provincial, sillonne la France et la Belgique et il ne fait pas la “tournée des popotes” ! Il a entamé la “visite canonique”. De “canonique” on connaît l’âge, le droit, le texte ou encore la licence, mais qu’est-ce qu’une “visite canonique” et quel est son but ?

“Que les frères qui sont ministres et serviteurs des autres frères visitent et avertissent leurs frères et qu’ils les corrigent humblement et charitablement, ne leur prescrivant rien qui soit contraire à leur âme et à notre Règle” préconise François d’Assise (2 Reg, 10,1). Ainsi, tous les trois ans, le frère Ministre provincial part rencontrer, pendant plusieurs jours, chaque frère et chaque communauté. Cette visite, codifiée par nos statuts officiels, d’où son nom de “visite canonique”, est une institution qui est vécue dans toute l’Église et ce, depuis saint Paul visitant tour à tour les communautés chrétiennes, les encourageant et pointant les écueils rencontrés. Chez nous, habituellement et dans une large majorité, les frères apprécient d’être écoutés. Ils y voient une occasion de réfléchir à voix haute sur eux-mêmes et sur ce qui est fondamental. Mais la visite est aussi reçue à partir de la personnalité de chacun : si j’ai du mal à accepter d’être accompagné, supervisé, ou si je suis plutôt indépendant, je peux appréhender ce moment mais si je suis habitué à la relecture et à la solidarité communautaire, je la vois arriver avec plaisir. Il y a dans cette visite comme un garde-fou au repli sur soi ou à l’isolement, voulu ou non, qui survient parfois au cœur d’une vocation comme dans toute vie humaine.

DANS LA CONFIANCE

Tout l’art du visiteur est d’approcher au mieux ce qui va bien et ce qui ne va pas bien, ce qui marche et ce qui est grippé. Elle requiert du Provincial toute une réflexion, opérationnelle et spirituelle, sur la façon d’effectuer sa visite, son format, les rencontres à agencer ou les temps à proposer autour de la vie communautaire (prière, repas, récréation…) pour faire de ce temps un moment de partage renforcé dans la confiance. Lors de l’échange individuel avec les frères, le visiteur peut pointer des limites personnelles ou communautaires et encourager à faire de nouveaux progrès. En contrepartie, c’est le droit de chaque frère d’être écouté et de pouvoir dire en vérité ce qu’il pense. Mieux on connaît la vie des frères, mieux on peut en améliorer les conditions de vie et promouvoir une formation permanente adéquate. Chaque frère demeure ensuite libre de suivre les conseils de son Provincial et de se mettre en mouvement. Et parce qu’il n’y a pas de baguette magique, la réussite de la visite canonique dépend de l’engagement de chacun, c’est une question de solidarité et de responsabilité entre le frère et l’institution. Si on a parfois du mal à voir les fruits de cette visite, la vie de la communauté reprenant plus ou moins comme avant ou avec des modifications insignifiantes, je crois qu’elle nous appelle à un réveil. Celui d’avoir le courage d’échanges en vérité et en transparence qui, peut-être, risqueront de bousculer nos quotidiens, nos habitudes, notre routine, nos individualismes ; courage aussi d’écarter la tentation de chercher la voie la plus facile. L’objectif de cette visite est surtout d’aider chaque frère à mieux vivre sa vocation, à trouver sa juste place dans sa communauté et dans la Province, chose qui ne peut être actée une fois pour toutes mais sans cesse à re-questionner. Il en va du sentiment d’appartenance, de fraternité et de solidarité communautaire qui est au fondement de notre vocation franciscaine.

Fr. François COMPARAT, OFM

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